
promesses
- Réduire d’un point le 1er palier d’impôt sur le revenu
- Annuler la TPS sur la première maison ≤ 1 M $ (rabais partiel jusqu’à 1,5 M $)
- Déclaration de revenus automatique pour les ménages à faible revenu et les aînés
- Étudier des hypothèques à long terme pour stabiliser les versements
- Crédits et financement pour thermopompes et rénovations écoénergétiques
- Subventions‑climat pour protéger les maisons contre feux et inondations
- Retirer définitivement la « taxe carbone » des consommateurs en modifiant la loi
- Créer « Maisons Canada » pour redevenir promoteur public de logements
- 25 G $ de financement à l’industrie canadienne de la préfabrication
- 10 G $ pour du logement très abordable (étudiants, aînés, vétérans…)
- Priorité aux matériaux sobres en carbone (bois massif, recyclé, etc.) dans les appels d’offres
- Incitatifs à l’embauche d’apprentis sur tout grand projet fédéral
- Diviser par deux les droits d’aménagement municipaux pendant 5 ans
- Réactiver la déduction pour amortissement des immeubles locatifs
- Financer la conversion d’immeubles existants en logements
- Étendre le FACL : moins de paperasse, zonage unifié
- Codes du bâtiment simplifiés et modèles préapprouvés
- Exclure les zones inondables ou à risque d’incendie pour tout projet subventionné
- Programme national d’assurance‑inondation d’ici avril 2026
- Élargir l’amortissement immédiat pour machines et équipement propres
- Porter le plafond RS&DE à 6 M $ et moderniser le programme
- Injecter 1 G $ dans l’Initiative de catalyse du capital‑risque
- Actions accréditives pour IA, quantique, biotech et fabrication avancée
- Créer un « régime privilégié des brevets » canadien
- Rendre permanent le Programme d’entrepreneuriat des communautés noires
- Stratégie sur les minéraux critiques : études techniques admissibles, élargir le CII, etc.
- Étendre l’infrastructure de bornes de recharge pour véhicules électriques d’ici 2027
- Réexaminer l’importation de carburants pour l’agro‑industrie
- Assurer la souveraineté énergétique et électrique nationale
- Mettre en œuvre les six crédits d’impôt verts (STFR, hydrogène, etc.)
- Faire du Canada un leader mondial du captage et stockage du carbone (CCUS)
- Accélérer l’analyse des grands projets énergétiques
- Protéger les ressources stratégiques contre les investisseurs prédateurs
- Établir des lignes directrices volontaires sur l’investissement durable (2026)
- Imposer une obligation fédérale de divulgation des risques climatiques
- Émettre des obligations fédérales de transition (≥ 10 G $/an dès 2027)
- Éliminer le chauffage fossile des bâtiments fédéraux d’ici 2030
- Réduire de 22 % les émissions grâce au logement préfabriqué
- Ajouter des milliers de médecins (places, facultés, résidences)
- Reconnaître plus vite les diplômes étrangers en santé
- Créer un permis national pour médecins et infirmières
- Fonds pour ouvrir de nouvelles cliniques familiales
- Investir 4 G $ dans des infrastructures communautaires de santé
- Accorder un crédit d’impôt « héros des soins » de 1 100 $/an aux PSSP
- Élargir le PFIMS pour former infirmières, PSSP et enseignants
- Financement permanent du Fonds santé sexuelle et reproductive
- Créer un Fonds de santé mentale des jeunes (100 000 jeunes/an)
- Allouer +500 M $ supplémentaires à la crise des surdoses
- Dédier 6 G $ via Maisons Canada aux logements avec soutien en santé mentale
- Financement permanent de la ligne d’aide 9‑8‑8
- Protéger et étendre la garderie à 10 $/jour (100 000 places)
- Bonifier les salaires des éducatrices et établir des seuils minimaux
- Imposer l’ajout de garderies dans toute nouvelle infrastructure publique
- Lier la création de garderies aux projets fédéraux de logement abordable
- Rendre permanent le Programme national d’alimentation scolaire
- Élaborer une stratégie nationale des soignants (pensions, avantages, etc.)
- Crédit d’impôt pour conserver l’épargne‑retraite hors de l’impôt
- Verser un supplément temporaire de 250 $ aux aînés modestes
- Moderniser les données santé et instaurer des formulaires électroniques
- Créer un groupe d’innovation en santé publique
- Protéger l’assurance‑médicaments ciblée (diabète, contraceptifs)
- Mener une étude nationale sur la santé post‑partum
- Constituer des bases de données sur ménopause, endométriose, etc.
- Renforcer le Plan d’action contre la violence fondée sur le genre
- Élargir le Fonds leadership économique des femmes
- Protéger le système de garderies pour l’égalité femmes
- Appliquer les appels à l’action de la CVR et les appels à la justice MMIWG
- Mettre en œuvre intégralement la DNUDPA et son plan d’action
- Accorder une hausse de salaire à tous les militaires
- Offrir logement, garderie et soins primaires sur les bases militaires
- Moderniser le recrutement en ligne et accélérer les cotes de sécurité
- Instaurer une politique de tolérance zéro pour l’inconduite sexuelle dans les Forces
- Acquérir de nouveaux sous‑marins et brise‑glaces pour l’Arctique
- Déployer une flotte élargie de drones aériens et sous‑marins
- Produire au Canada des avions d’alerte avancée
- Fournir artillerie autopropulsée et DCA terrestre à l’Armée
- Doter la Garde côtière d’un nouveau mandat et d’équipements améliorés
- Investir dans les Rangers et la Réserve
- Initier des co‑projets à usage civil et militaire dans le Nord avec partenaires autochtones
- Construire ports en eau profonde et radars trans‑horizon dans l’Arctique
- Conclure un accord Canada‑Europe sur la sécurité arctique
- Soutenir un projet hydroélectrique et des infrastructures énergétiques nordiques
- Mettre sur pied un Bureau canadien de R‑D défense (IA, quantique, cybersécurité)
- Créer une Agence d’approvisionnement défense et promouvoir l’« Acheter canadien »
- Participer au plan ReArm Europe pour la défense transatlantique
- Adopter une loi éliminant les obstacles fédéraux au commerce intérieur
- Établir la reconnaissance mutuelle des titres de compétence entre provinces
- Lancer l’initiative « Coupe‑papier » : simplifier chaque règlement fédéral en 60 jours
- Publier une liste de projets nationaux et accélérer leur évaluation
- Créer un Fonds de diversification des corridors commerciaux (5 G $)
- Construire un réseau électrique Est‑Ouest pancanadien
- Allouer 250 M $ au transport collectif rural
- Financer des infrastructures numériques : centres de données, 5G, fibre
- Mettre sur pied un fonds catastrophes pour reconstruire les liaisons critiques
- Doubler à 10 G $ l’enveloppe du programme de prêts autochtones
- Introduire un laissez‑passer « Un Canada fort » : musées et VIA Rail gratuits pour les jeunes
- Offrir l’entrée gratuite dans tous les parcs nationaux à l’été 2025
- Augmenter de 150 M $ le financement de CBC/Radio‑Canada et moderniser son mandat
- Protéger et élargir le programme fédéral de soins dentaires pour les 18‑64 ans non assurés
- Établir une cible de 12 % d’immigrants francophones hors Québec d’ici 2029
- Soutenir les entrepreneurs des communautés de langue officielle en situation minoritaire
- Investir dans des espaces communautaires pour minorités anglophones du Québec et minorités francophones ailleurs
- Promouvoir l’enseignement du français partout au Canada (garderies, bourses, services d’apprentissage)
- Poursuivre la mise en œuvre du programme de rachat des armes d’assaut
- Instaurer la pré‑classification GRC des nouveaux modèles d’armes à feu
- Révoquer automatiquement les permis d’armes des personnes condamnées pour crimes violents ou violence conjugale
- Investir dans la capacité des laboratoires judiciaires de la GRC pour le retraçage des armes utilisées dans des crimes
- Renforcer la délivrance des permis d’armes à feu et les lois « drapeau jaune » et « drapeau rouge »
- Mettre le potentiel énergétique du Canada à la portée du monde (exportations et partenariats internationaux)
analyse idéologique du programme «un canada fort»
Le programme Carney à travers la lunette du libéralisme classique
Le programme de Mark Carney et des libéraux comprend 109 promesses ambitieuses, riches en interventions étatiques, et orientées vers une expansion significative du rôle d’Ottawa. Si certaines mesures peuvent se concilier avec certains idéaux libéraux classiques, une large part du plan entre en tension directe avec la philosophie de l’État limité, de la responsabilité individuelle, et du libre marché régulé par le droit plutôt que par la planification centrale.
Quelques mesures partiellement compatibles avec le libéralisme classique
Certaines propositions libérales peuvent s’accorder — au moins en partie — avec la pensée libérale classique :
-
Réduction du premier palier d’impôt sur le revenu : la baisse d’impôt est conforme à l’idée friedmanienne selon laquelle un individu est mieux placé que l’État pour allouer ses ressources.
-
Déclaration de revenus automatique pour les aînés et ménages modestes : elle peut être vue comme une simplification bureaucratique, donc favorable à la transparence et l’efficacité.
-
Élargir l’amortissement immédiat pour machines propres et rehausser le plafond RS&DE : incitatifs ciblés à l’investissement privé qui soutiennent la productivité sans créer de dépendance directe à la subvention.
-
Reconnaissance plus rapide des diplômes étrangers en santé : une mesure pro-marché du travail, qui réduit les barrières à l’entrée et respecte l’ordre spontané des compétences.
-
Simplification réglementaire dans le bâtiment (zonage unifié, codes simplifiés, etc.) : compatible avec la vision de Hayek d’un ordre économique fondé sur des règles claires et universelles, plutôt que sur des autorisations politiques arbitraires.
Une majorité de mesures contraires aux principes du libéralisme classique
Mais dans l’ensemble, le plan Carney propose une centralisation accrue, une multiplication des programmes et une planification interventionniste dans des champs traditionnellement provinciaux ou individuels.
Voici les principales tensions :
1. Expansion de l’État fédéral dans des champs provinciaux
Des dizaines de promesses touchent à la santé, l’éducation, le logement, les garderies, la culture, etc. – des domaines que le libéralisme classique considère comme relevant des communautés locales, de la société civile ou, dans le cas canadien, des provinces. La volonté d’imposer des standards, de lier des financements à des conditions précises ou de « revenir dans la construction résidentielle » va à l’encontre du principe de subsidiarité cher aux libéraux classiques.
2. Création massive de programmes publics dirigés
La création de « Maisons Canada » comme promoteur public, les crédits d’impôt verts, les obligations de transition, les fonds pour la santé mentale, les fonds pour les jeunes, les fonds pour la diversité économique, les incitatifs dirigés à la main par Ottawa, etc. relèvent d’une logique de planification industrielle ou sociale, souvent dirigée d’en haut, ce que Hayek dénonçait comme source d’inefficience et de perte de liberté.
3. Croissance des subventions et dépenses ciblées
Plusieurs dizaines de milliards de dollars sont promis à des segments bien définis (militaires, communautés, entreprises vertes, institutions culturelles, minorités linguistiques, Radio-Canada, etc.), ce qui remplace une logique universelle par une logique clientéliste, dénoncée depuis Bastiat comme une forme de redistribution discrétionnaire par l’État.
4. Contrôle et réglementation accrue
Certaines promesses proposent l’imposition de normes ou de cibles obligatoires (en logement, garderies, climat, diversité, énergie), ou encore l’obligation de divulgation climatique, l’interdiction de certaines constructions, ou la planification du réseau électrique national. Ces approches s’opposent à la flexibilité du marché et à la confiance dans les mécanismes d’ajustement spontané, piliers de la tradition libérale classique.
Un programme au goût néo-keynésien plus qu’au parfum libéral
Le programme de Carney évoque plus un retour de l’État développeur, redistributif et prescripteur, tel qu’imaginé dans l’après-guerre, qu’une vision libérale classique. Il favorise l’intervention de l’État dans les marchés, dans la culture, dans les comportements (nutrition, énergie, genre, parentalité, mobilité, logement) plutôt que de miser sur la responsabilité individuelle, l’innovation décentralisée et la liberté contractuelle.
Cela ne veut pas dire que tout est inefficace ou mal intentionné — mais dans une perspective purement libérale classique, ce programme semble aller dans le sens opposé des idées de Hayek ou Friedman.
Conclusion
Si on évalue les 109 promesses selon les critères du libéralisme classique, on peut dire que :
-
Environ 10 à 15 promesses s’alignent partiellement avec les valeurs libérales classiques (baisse d’impôt, simplification réglementaire, reconnaissance de diplômes étrangers, etc.).
-
La grande majorité du programme (80 à 90 promesses) repose sur une philosophie étatiste, redistributive, interventionniste et centralisatrice, incompatible avec l’idée que les marchés libres, les citoyens autonomes et les institutions locales sont les meilleurs vecteurs de progrès durable.
Ce que les penseurs diraient...
Milton Friedman :
Il aurait applaudi les réductions d’impôts, les déductions pour amortissement ou la simplification de la réglementation. Mais il aurait dénoncé le financement massif de programmes publics (logement, santé, garderies) comme des distorsions du marché qui menacent la responsabilité individuelle.
Friedrich Hayek :
Hostile à toute forme de neutralisation bureaucratique, Hayek aurait vu d’un très mauvais œil la multiplication des agences fédérales, des normes unifiées et des programmes nationaux dans les champs de compétence provinciale. Pour lui, ce plan est un exemple de planification centrale masquée.
Frédéric Bastiat :
Il aurait interrogé une à une les promesses en posant sa question célèbre : "Et ce qu’on ne voit pas ?". Car chaque subvention ou gratuité a un coût invisible : l’alourdissement fiscal, la dépendance des citoyens, la perte de liberté locale.
Centralisation sous couvert de progrès
Le programme Un Canada fort pourrait presque s’intituler Un Ottawa plus fort. Derrière des objectifs nobles, on assiste à un glissement discret mais réel vers un État fédéral interventionniste, omniprésent dans des domaines que la Constitution confie pourtant aux provinces.
Créer des cliniques, fixer les salaires des éducatrices, définir des seuils de logement, imposer des normes de construction, distribuer des crédits d’impôt comportementaux : tout cela dépasse le simple rôle d’un arbitre fédéral. C’est une vision top-down du pays.
Conclusion : un plan moderne, mais pas libéral
Mark Carney se présente comme un homme de rigueur et d’économie. Mais son plan, en majorité, s’éloigne du libéralisme classique. Il ne libère pas l’individu : il le structure, le guide, et le finance conditionnellement.
Le « Canada fort » de Carney est peut-être bien intentionné. Mais ce n’est pas un Canada libre au sens de Hayek.
Et certainement pas un Canada limité au sens de Friedman.
- L'équipe de sous le paillasson
Rien sous le tapis, tout sous la loupe
Ajouter un commentaire
Commentaires