Santé publique et réalignement stratégique : ce que révèle l’agenda MARA

Publié le 18 mai 2025 à 22:45

L’entrevue diffusée récemment sur la chaîne Tocsin avec l'avocat et chroniqueur Renault Beauchard propose une plongée détaillée dans ce qui pourrait devenir l’un des piliers politiques majeurs du second mandat de Donald Trump : l’agenda Make America Healthy Again (MARA).

Ce programme, officialisé par décret présidentiel le 13 février 2025, dresse un constat préoccupant de la santé publique américaine : espérance de vie stagnante à 78,8 ans (contre 82,6 ans dans les autres pays développés), explosion des maladies chroniques, et une génération d’enfants en difficulté — 40 % souffrant de conditions comme l’asthme ou des troubles auto-immuns. L’autisme est particulièrement mis en lumière, avec des taux ayant augmenté de 1 pour 10 000 dans les années 1980 à 1 sur 36 aujourd’hui, et jusqu’à 1 sur 3 en Californie selon certaines estimations.

Un comité présidentiel inédit

Le décret crée une commission présidentielle spéciale, dotée d’un mandat de 100 jours (jusqu’au 23 mai 2025) pour dresser un état des lieux, puis 180 jours pour soumettre une stratégie d’intervention. Ce comité s'intéresse notamment à :

  • L'alimentation et l’agriculture industrielle

  • Les toxines environnementales

  • L’usage abusif des médicaments

  • L'influence des entreprises privées sur la science

Autrement dit, il s’agit d’une refonte profonde de la manière dont les politiques de santé publique sont conçues et appliquées aux États-Unis.

Une équipe médicale controversée

Renault Beauchard rappelle que l’équipe en place autour de Trump est atypique, voire clivante. On y retrouve :

  • Robert F. Kennedy Jr., nommé secrétaire à la Santé et aux Services sociaux, avocat environnementaliste connu pour ses prises de position critiques envers les vaccins.

  • Jay Bhattacharya, professeur à Stanford et signataire de la Déclaration de Great Barrington, opposée aux confinements généralisés, maintenant directeur du NIH (National Institutes of Health).

  • Dr. Marty Makary, chirurgien et professeur en santé publique, à la tête de la FDA.

Tous partagent une vision plus préventive, holistique et critique de l’établissement médical actuel. Le décret MARA est en effet porteur d’un changement de paradigme : plutôt que traiter les maladies, l’État entend s’attaquer à leurs causes profondes, y compris les modes de vie et les comportements alimentaires.

La fin des recherches sur le « gain de fonction »

L’un des moments forts évoqués par Renault Beauchard est une courte allocution de Robert F. Kennedy Jr., diffusée dans le Bureau ovale lors de la signature d’un décret mettant fin au financement fédéral des recherches dites de « gain de fonction ». Selon Kennedy, ces travaux auraient été menés de longue date par des agences militaires américaines, malgré les engagements internationaux pris dès 1973 avec la Convention sur les armes biologiques.

Il évoque aussi une faille dans le Patriot Act (2001) qui aurait offert une forme d'immunité juridique aux responsables de ces recherches. Anthony Fauci, ancien directeur du NIAID, est explicitement désigné comme l’un des acteurs ayant contourné le moratoire instauré par Obama en 2014 pour déplacer certains projets vers le laboratoire de Wuhan.

Une crise de confiance envers les autorités sanitaires

Renault Beauchard souligne que cette refonte de la santé publique intervient dans un contexte de défiance croissante envers les institutions médicales. La pandémie de COVID-19 aurait agi comme un révélateur (« apocalypse » au sens biblique, selon le philosophe Paul Kingsnorth), exposant une fragilité démocratique, une psychose collective, et une polarisation accrue de la société américaine.

Un virage électoral chez les jeunes?

L’entrevue mentionne deux sondages récents cités par le journaliste Alex Berenson, suggérant un glissement de l’électorat jeune (18–24 ans) vers le Parti républicain. En cause : une perception de « vol de l’enfance » pendant la pandémie, avec des années perdues en socialisation, sport et scolarité, au profit de mesures sanitaires jugées trop strictes. Le programme MARA pourrait ainsi devenir, selon Beauchard, un cri de ralliement pour cette génération désabusée.

Agriculture et prévention : un nouveau modèle?

Enfin, l’agenda MARA propose d’explorer des idées nouvelles, telles que :

  • La collaboration entre agences de santé et agriculteurs pour améliorer la qualité nutritionnelle de l’alimentation

  • L’assurance maladie remboursant des changements de mode de vie (diète, sport, environnement)

  • Une approche systémique liant santé, environnement et sécurité nationale

Cependant, de nombreux obstacles subsistent, notamment au sein même du Parti républicain, traditionnellement favorable à l’agriculture industrielle et aux grandes entreprises. Renault Beauchard met également en garde contre le risque de transformer cette réforme en outil d’une guerre culturelle, où la santé deviendrait un nouveau front idéologique.


Conclusion :
L’administration Trump 2025 semble vouloir marquer une rupture dans l’approche américaine de la santé publique. Le programme MARA est ambitieux, controversé et encore fragile. Il soulève des espoirs chez une frange de la population désenchantée, mais aussi des inquiétudes quant à sa faisabilité réelle dans un écosystème politique et économique complexe. Le rapport attendu le 23 mai 2025 devrait offrir une première indication du sérieux et de l’ampleur de cette nouvelle orientation.

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