
Lors de son premier mandat, Donald Trump se présentait comme un président en rupture avec l’interventionnisme américain. Il dénonçait les guerres inutiles, les aventures extérieures, et promettait une politique de retrait : rapatrier les troupes, faire passer les intérêts intérieurs avant tout. Pendant quatre ans, il n’a déclenché aucun nouveau conflit majeur. « Premier mandat, il faisait pas la guerre », rappelle Charles Gave.
Mais à l’approche d’un second mandat potentiel, quelque chose a changé. Trump parle différemment. Il ne remet plus en question les alliances stratégiques. Il ne critique plus frontalement le complexe militaro-industriel. Et surtout, il finance.
« Le budget militaire devait baisser de 80 milliards, finalement il augmente de 240 », constate Gave. L’écart est massif. La posture aussi. L’ancien président qui fustigeait les dépenses démesurées du Pentagone se trouve aujourd’hui dans la position de celui qui les amplifie.
Comment expliquer ce revirement ? Charles Gave évoque un basculement de ligne, un renoncement. « Il a laissé tomber la forteresse. Il refait l’empire. Et plus fort. » Trump, qui prônait la « forteresse Amérique », cède désormais à une logique d’empire reconstruit, renforcé, plus affirmé que jamais. Il bénit les interventions de ses alliés, soutient les politiques d’escalade, et augmente les budgets militaires au lieu de les comprimer.
Pour Gave, cette mutation n’est pas qu’une question de stratégie. C’est une question de souveraineté. « Il avait dit que le peuple était souverain. Aujourd’hui, il ne le dit plus. » L’homme qui avait promis de rendre la voix au peuple américain semble désormais parler pour d’autres. Le pouvoir, l’influence, les réseaux : quelque chose, quelque part, a repris le dessus.
Et derrière ce changement, il y a la mécanique bien rodée d’un système qui se nourrit de crises. « L’outil de corruption, c’est le budget de la défense », insiste Gave. L’argent public injecté dans l’armement, les contrats massifs, les surenchères stratégiques deviennent un carburant politique, et Trump, comme ses prédécesseurs, semble aujourd’hui en dépendre.
L’effondrement de la politique étrangère américaine n’est pas visible dans les discours. Il se lit dans les chiffres. Les milliards pleuvent. Les tensions montent. Et pendant que les élites redessinent les contours de leur empire, les citoyens paient. « À ce rythme-là, l’effondrement de nos monnaies entraînera l’effondrement de l’empire », conclut Gave.
Il y a eu un Trump insurgé. Il y a désormais un Trump stratège. Reste à savoir s’il joue avec le système… ou s’il s’est fait prendre dans ses filets.
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